Intervention d'Emmanuelle Coratti (Back To Earth et UMR Territoires) lors des Agroecology Science Days
Entre hybridation et choc des cultures, quelle contribution du « retour à la terre » aux dynamiques de transition agroécologique des territoires ? Enquête dans les Pyrénées, le Massif Central et la Thessalie.
Parmi les leviers de la transition au sein de la société locale, notre association et notre recherche étudient depuis plusieurs années le « retour à la terre » d’urbains en reconversion. Si le phénomène est encore de l’ordre du signal faible, un nombre croissant de néo-agriculteurs s’installent dans les territoires ruraux et y renouvellent les approches environnementales et productives, venant ainsi faire évoluer les dynamiques territoriales. Non issus du monde agricole, ces nouveaux installés venus des villes, apportent des compétences issues de précédentes vies professionnelles et des pratiques agroécologiques, leur reconversion s’inscrivant dans un projet d’engagement environnemental et de changement de vie au service du Vivant. Les territoires auraient tout à gagner à accueillir ces nouveaux installés. Or leur intégration et leurs liens notamment avec les agriculteurs peuvent aussi bien être fluides que problématiques.
Comment leurs projets sont-ils accueillis dans les territoires ? Comment les impactent-ils ? Leurs pratiques font-elles évoluer celles des agriculteurs de souche et inversement leurs projets sont-ils influencés par les spécificités et les pratiques territoriales ?
L’hypothèse que nous aimerions tester est que la transition agro-écologique pourrait bénéficier d’une recombinaison des connaissances des agriculteurs de souche et des innovations apportées par les néoagriculteurs, et que cette recombinaison dépend de la capacité d’accueil et de mise en lien des territoires. Si les agriculteurs de souche connaissent en effet parfaitement le territoire, ses terroirs, sa biodiversité, et portent pour certains des pratiques agroécologiques, les seconds apportent de nouvelles approches et un engagement affiché pour les transitions. Mais se rencontrent-ils ? Entre un « choc des cultures » menant à des confrontations ou à l’inverse une rencontre féconde menant à l’hybridation et l’innovation, quel est le spectre des liens entre néoagriculteurs et agriculteurs locaux ? Comment la gestion des interfaces et la création d’espaces de dialogue peut-elle bénéficier à la transition agroécologique des territoires ?
Nous vous proposons de partager les premiers résultats de notre projet d’enquête mené pour le Réseau Rural National et le Ministère de l’Agriculture, en partenariat avec l’Agence des Pyrénées, le Cube Consultants, l’Institut d’Auvergne Rhône Alpes de Développement des Territoires et Terra Thessalia. Cette enquête est actuellement menée dans 5 terrains (Beaujolais Vert et Aubrac pour le Massif Central, Val d’Azun et Couserans pour les Pyrénées et la Thessalie en Grèce) avec une méthodologie privilégiant des entretiens semi-directifs auprès des agriculteurs « ancrés » localement, des néo-agriculteurs et porteurs de projets entrepreneuriaux et des structures d’accompagnement.
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